Le stress force près de 40% des Québécoises à l'arrêt de travail
( selon TVA Nouvelles et Journal de Montreal)
Près de 40% des Québécoises ont déjà arrêté de travailler en raison du stress selon ce que révèle un sondage Léger réalisé pour TVA Nouvelles et le Journal de Montréal.
En comparaison, seulement 32% des répondants masculins avouent un burn-out ou une dépression à cause du stress.
Marie-Christine Belzile est l’une de ces femmes. La pression de son arrivée sur le marché du travail et de devoir performer dans toutes les sphères de sa vie est un jour devenue trop forte.
À 34 ans, elle sort d’une première dépression.
«Du jour au lendemain... Ça a été le corps qui complètement flanché. On ne peut plus se lever le matin (...) En tant que femme, je sentais qu’il y avait une culture du don de soi assez prononcée. On dirait qu’on s’en demande plus que les autres nous en demandent. On veut performer», confie-t-elle.
«Je ne veux pas dire que toutes les femmes sont comme ça, mais on veut en donner beaucoup plus que le client en demande. On veut que tout le monde soit content et des fois on a tendance à s’oublier dans tout cela.»
«Il y a aussi des réponses physiologiques qui sont différentes par rapport à l’homme», soutient le directeur général de l’association Revivre qui vient aide aux personnes souffrant de troubles anxieux, dépressifs ou bipolaires, Jean-Rémy Provost.
«Je pense que les femmes se mettent énormément de pression parce qu’elles ont plusieurs responsabilités sur leurs épaules. Il y a encore beaucoup d’hommes qui malheureusement ne s’occupent pas assez, entre autres, des tâches ménagères à la maison.»
Le quart des répondants au sondage affirment avoir déjà pris des médicaments pour combattre le stress et l’anxiété. Chez les femmes, le chiffre bondit à 37%.
«Les femmes consultent plus ce qui fait qu’elles sont plus représentées au niveau des ordonnances d’antidépresseurs ou d’anxiolytiques», explique M. Provost.
Pour Marie-Christine Belzile, il faut en effet consulter et chercher de l’aide.
«On va trouver quelque chose de bénéfique au bout de ça, car on va apprendre à mieux se connaître et à mettre nos limites», croit la jeune femme.
Et parmi les autres éléments les plus stressants pour les femmes: les enfants.
Les mères (42%) s’en font plus que les hommes (29%) pour leurs petits; un pourcentage qui grimpe encore plus chez les jeunes familles (51% chez les 35-44 ans).
L’argent, facteur de stress
Les abonnés de la page Facebook TVA Nouvelles ont eux aussi identifié leur situation financière et leur rythme de vie comme principaux facteurs de stress.
Lorsque nous leur avons demandé quelle est leur relation avec le stress et l’anxiété, plusieurs internautes ont montré du doigt la société de consommation.
«Les autos sur 96 mois, le bateau sur 20 ans, la roulotte sur 15 ans, le spa sur dix ans, la maison de 340 000$ sur 25 ans et j’en passe. Je crois réellement que la source première de ce stress on se la cause nous même, et tout cela pourquoi? Simplement pour ressembler au voisin qui semble si heureux en façade, mais qui a les mêmes problèmes financiers à long terme», a écrit Nic Chartrand.
«Pour moi, le stress s’explique par de faux besoins de tout avoir sans en avoir les moyens. Tellement facile de s’endetter. On achète à crédit, on voyage à crédit, etc. Moi, je suis de la génération que lorsque nous achetions soit le frigo, soit le four, tout était payé», a pour sa part écrit Lucienne Dufour.
«Les loyers sont si chers... Les comptes, payer nos autos, la nourriture coûte cher... Je suis travailleur autonome et je ne sais jamais pour les lendemains. Je stress en ne sachant pas si mes contrats vont être renouvelés», a commenté Suzanne Bernier.
«On vit dans un monde hyper matérialiste et nous voulons tous des bébelles plus belles et plus grosses que le voisin. Tout cela a un prix», a écrit Patrice Levasseur.
«Comment ne pas l’être? Donner le meilleur rendement au bureau, être un parent parfait, apprendre à être le couple parfait, avoir la maison parfaite, inscrire nos enfants dans toutes sortes d’activités sportives et leur demander d’être les meilleurs, avoir la meilleure alimentation qui soit, avoir la meilleure forme au travers tout ça, la plus belle apparence, avoir le plus d’argent possible pour se payer plein de choses inutiles... Les deux doivent travailler 40 heures pour arriver, mais il faut que la maison reste impeccable, cours faire des courses le soir ou sur l’heure du dîner pour arriver... Il y a de quoi être stressé et nos enfants aussi», conclut Caroline Cloutier.
Chaque fin de mois vous apporte son lot d’inquiétudes. Comment allez-vous payer tous vos comptes et faire vivre votre famille? L’argent surtout le manque d’argent vous stresse, vous êtes à l’image de 51% des Québécois comme l’indique notre sondage.
«Je vois des gens stressés par leur situation financière dans mon travail, mais aussi quand je discute avec des parents, des amis, des voisins, ça ressort de façon assez systématique», explique Carole Laberge, conseillère budgétaire à l’ACEF du Nord de Montréal.
Et si l’on dépensait trop et vivait au-dessus de nos moyens? «Les familles peuvent se permettre de moins en moins de luxe. Depuis les années 80, les salaires ont stagné par rapport aux dépenses courantes qui ont continué à augmenter: le loyer, l’électricité, les télécommunications. Ces besoins de base viennent chercher une partie de leurs revenus», ajoute Mme Laberge.
Recours au crédit
Malgré l’argent qui manque, il est difficile de ne pas s’offrir de petits plaisirs. Tout le monde a envie de se gâter quand on travaille fort, de faire plaisir à ses proches, le crédit devient tentant.
«Pour pallier au manque de revenu, on choisit le crédit qui est facilement offert de toute sorte de façon: cartes de crédit, marges de crédit, marges de crédit hypothécaire», informe Carole Laberge.
Vivre à crédit génère du stress. «Le remboursement accapare une bonne partie des revenus, car les gens ne sont plus capables de rembourser. Ils ont essayé toutes sortes de stratégies de remboursement avant d’arriver ici en consultation budgétaire. Certains utilisent le crédit pour les besoins de base comme l’épicerie.»
Plusieurs familles qui n’ont pas assez de revenus et trop de dépenses vivent même d’une paye à l’autre.
«Il n’y a plus de plaisir à travailler quand le travail sert juste à payer des comptes, que l’on ne peut pas générer de l’épargne pour s’offrir des vacances, acheter une maison, faire des projets de vie. S’il arrive une maladie, un accident de voiture, une perte d’emploi, ça se met à déraper facilement. Le budget des familles est de plus en plus difficile à équilibrer entre les revenus et les dépenses», conclut Carole Laberge.
Le multitâche, c'est stressant!
TVA Nouvelles et Le Journal de Montréal révélait que 37% des femmes ont déjà pris des médicaments pour combattre le stress et l’anxiété et que les enfants sont un très grand facteur de stress pour celles-ci.
«Je ne comprends pas pourquoi les femmes sont si stressées. Faire des petits, être une super maman, continuer de performer au boulot, faire la cuisine, courir, s'entraîner pour perdre du poids, courir porter les enfants le matin, courir les chercher le soir, faire les devoirs, essayer de donner du temps à chéri... vraiment, je ne comprends pas pourquoi les femmes sont si stressées!!», écrit Claudia Langlois, ironiquement.
«Le stress m'a souvent rendue très malade. Évidemment, n'ayant pas les moyens financiers d'arrêter, je continue tout de même à travailler et les journées sont pénibles de plus en plus. On a beau sourire, faire de son mieux, c'est là; ça te gruge comme un poison», a commenté Kate Bélanger.
«L'argent a souvent été un facteur de stress pour beaucoup de gens et les gens se brûlent à travailler, faire les repas, aller au gym, etc. Il faut toujours performer partout et tout ça pour s'acheter le nouveau chandail Guess ou la nouvelle voiture», écrit Steeve Beauchesne.
«J'ai tellement d'admiration pour toutes ces femmes qui jonglent avec le travail et les enfants en plus de tous les tracas quotidiens je leur lève mon chapeau très haut et je comprends très bien leur stress», a pour sa part écrit Denise Gosselin.
Une solution pour relaxer?
«Je voterais pour le yoga obligatoire!», propose Annik Coderre
«Les femmes auraient avantage à accepter de ne pas être parfaites»
Les femmes doivent apprendre à ne pas sentir l’obligation d’être parfaite dans toutes les sphères de leur vie si elles veulent atteindre le bonheur et éliminer le stress.
Tel est le constat de la psychologue Rose-Marie Charest devant les résultats du sondage Léger réalisé pour TVA Nouvelles et le Journal de Montréal qui révèle que près de 40% des femmes ont déjà été en arrêt de travail en raison du stress.
«Les femmes auraient avantage à dire: je vais accepter de ne pas être parfaite. Ne pas être parfaite partout, c’est la solution pour que les femmes puissent trouver le bonheur autant dans leur vie familiale que dans leur travail. Et le bonheur, c’est le meilleur antidote au stress», a expliqué Mme Charest à TVA Nouvelles.
Quant au fait que 42% des femmes identifient les enfants comme source de stress comparativement à seulement 29% des hommes, Rose-Marie Charest y voit un élément bien ancré dans notre mode de vie.
«Je pense qu’encore aujourd’hui, malgré toute l’évolution, les femmes considèrent encore qu’elles sont plus responsables des enfants.»
Malgré les tendances qui ressortent du sondage, la psychologue apporte cependant une nuance importante qui peut influencer les données.
«Quand on demande aux femmes si elles sont stressées, elles vont répondre plus facilement que les hommes. Quand on parle de soi, nous les femmes, on admet beaucoup plus facilement. [...] Il y a une question d’estime de soi. C’est moins difficile pour la femme d’admettre qu’elle est stressée, ça la remet moins en cause que pour l’homme», affirme Mme Charest.
Les fins de semaine ne suffisent pas pour recharger les batteries
Le rythme de vie effréné avec lequel doivent composer des milliers de Québécois n’est pas étranger au fait qu’ils se sentent souvent stressés.
Le sondage mené par la firme Léger pour TVA Nouvelles et le Journal de Montréal est clair : la majorité des Québécois disent que leurs fins de semaine ne leur permettent pas de revenir en forme au travail le lundi.
Au total, 45% des répondants ont affirmé que les fins de semaine leur permettent «parfois» de retourner au travail en forme, alors que 10% ont répondu «jamais». Seuls 13% ont répondu «très souvent» et 30% «souvent».
«On le voit dans le sondage, 55% des gens estiment que le week-end n’est pas suffisant pour recharger les batteries. Souvent, la fin de semaine, les parents deviennent les Uber parents avec les cours de ci, les cours de ça... Est-ce que le sondage est un plaidoyer pour la semaine de quatre jours? Je ne sais pas, mais il y en a qui vont s’en servir comme argument», commente Christian Bourque, vice-président de Léger.
CONJOINT STRESSANT
Par ailleurs, le quart des Québécois considèrent leur conjoint comme une source de stress. Le taux grimpe même à 39 % chez les gens de 35 à 44 ans.
«Le stress en couple est souvent généré par les attentes auxquelles on n’est pas en mesure de répondre ou auxquelles l’autre ne répond pas», explique le psychologue spécialisé en thérapie de couple François St-Père. Ça pourrait être les tâches de la vie quotidienne, la façon d’élever les enfants ou une sexualité insatisfaisante.
Notre sondage révèle également qu’un répondant sur cinq reconnaît qu’il lui arrive d’avoir envie de changer de conjoint.
Du côté des célibataires, le statut de personne seule est une source de stress pour 27 % d’entre eux.
STRESSÉS, MAIS HEUREUX
La très grande majorité des Québécois se disent heureux, montre le sondage.
«Les gens sont stressés, mais ils ont l’impression qu’ils sont capables de bien vivre avec et de gérer leurs problèmes», souligne Christian Bourque, analyste chez Léger.
Selon le sondage, pas moins de 90 % des répondants se sont estimés heureux et ce taux monte même à 95 % dans les familles avec enfants. D’ailleurs, le psychologue Camillo Zacchia rappelle que le stress n’est pas mauvais en soi, mais que tout est une question d’équilibre.
«C’est bon d’avoir des intérêts et d’être occupé. La question est: avez-vous le temps d’apprécier ce que vous avez?»
La clé du bonheur en trois mots, selon lui, c’est: «Baissez vos attentes».